ORCA : tout savoir sur la plus grande usine de captage de CO2 dans l’air
Temps de lecture : 5 min
La start-up Suisse Climeworks a inauguré début septembre la plus grande usine mondiale de captage dans l’air et de stockage de CO2.
Baptisé Orca, ce projet a été installé non loin de Reykjavik, la capitale de l’Islande, à proximité de la centrale géothermique de Hellisheidi qui alimente les installations en énergies renouvelables.
Objectif : capter le CO2 présent dans l’atmosphère, le stocker sous terre et, d’ici 2025, éliminer 0,00001 % des gaz à effets de serre émis sur Terre.
On fait le point pour vous dans notre article de la semaine.
Capter le CO2 et l’enfouir sous terre
Le captage et le stockage de CO2 n’est pas une nouveauté. Plusieurs projets de ce type ont déjà vu le jour, comme l’usine Arctic Fox implantée également en Islande en 2017 et capable de capter environ une cinquantaine de tonnes de CO2 chaque année.
De leur côté, plusieurs grandes entreprises très polluantes, comme les raffineries, les aciéries ou les cimenteries, utilisent déjà cette technique directement à la sortie des cheminées. Un processus qui est d’ailleurs plus simple et moins coûteux en raison de la concentration en volume plus élevé (4 à 40%) que dans l’air où le CO2 est très dilué (de l’ordre de 0,4%).
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Mais Orca, qui signifie “énergie” en islandais, marque le passage de ce type de projet à une toute autre échelle industrielle.
Installée à une trentaine de kilomètres de la capitale Reykjavik, l’usine est entièrement alimentée en énergies renouvelables grâce à la proximité de la centrale géothermique de Hellisheidi.
We're still buzzing from the launch of #Orca.
In case you missed it, watch our video tour that takes you through our history to retrace the milestones that enabled us to realize our vision of bringing large-scale #DirectAirCapture to reality.
Watch here: https://t.co/k7URCnC2Ey pic.twitter.com/qFMGF0eEQg— Climeworks (@Climeworks) September 23, 2021
Le projet est le fruit de l’association de la start-up Suisse Climeworks et du système islandais Carbfix. Les travaux de l’usine, initiés en décembre 2020, ont été possibles grâce à une levée de fonds record de plus de 92 millions d’euros opérée par Climeworks pour recréer en quelques années ce que la nature met plusieurs milliers d’années à réaliser.
Comment fonctionne Orca ?
Orca est composé de quatre unités qui comportent chacune deux grands collecteurs.
L’usine intègre six sous-cellules de captage intégrant deux immenses ventilateurs chacune.
Ceux-ci brassent l’air ambiant et l’aspirent pour le faire passer dans des filtres éponges dotés de solvants chimiques captant le carbone.
La soufflerie thermique monte ensuite à 100° C et permet d’isoler et extraire le CO2 qui est ensuite plongé dans l’eau et envoyé à plus de 1000 mètres de profondeur grâce à la technologie développée par la start-up Carbfix.
Cette dernière est une filiale de Reykjavik Energy, née en 2006 d’un partenariat entre l’Université d’Islande, une équipe toulousaine du CNRS (Centre National de la Recherche Scientifique) ainsi que de l’Université américaine de Columbia.
Lors de sa descente, le CO2 se retrouve au contact des roches basaltes et se fige éternellement, reproduisant ainsi le processus naturel de minéralisation.
Compenser 0,0001% des émissions de gaz à effet de serre mondiales d’ici 2025
L’objectif d’Orca est de capter et stocker sous terre 4000 tonnes de CO2 par an d’ici 2025, soit l’équivalent des émissions annuelles de 200 à 300 personnes en Suisse selon Bloomberg.
Concrètement, Orca compensera chaque année les émissions de CO2 de 870 voitures, sur toute leur durée de vie, ou encore l’équivalent d’environ 4000 vols Paris – New-York.
Pour le moment, l’usine est opérationnelle pour une durée de 12 ans.
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Limiter le réchauffement climatique
Si la compensation des émissions de CO2 annuelles prévue par Orca peut paraître trop faible, elle ouvre la voie à deux nombreux projets du même type pour contrer les effets du réchauffement climatique.
Pour rappel, l’accord de Paris sur le climat de 2015 fixe une limite de l’augmentation des températures mondiales de +1,5°C.
D’après un article des Nations Unies, cet objectif ne serait plus atteignable aujourd’hui, à moins d’un changement immédiat des politiques énergétiques et environnementales.
Un avis partagé par les scientifiques du GIEC, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, qui malgré un nouveau rapport alarmiste estime qu’il est encore temps d’agir.
“On a extrait du carbone du sous-sol (pétrole, charbon, gaz naturel) pour nos besoins énergétiques. En le brûlant, on émet du CO2. Donc, renvoyons ce carbone dans le sous-sol, en stockant le CO2 sous terre. C’est le puits de carbone géologique qui offre un moyen efficace pour réduire les émissions résiduelles incompressibles de CO2 des installations industrielles”, explique Isabelle Czernichowski-Lauriol, déléguée à la Recherche et à l’Appui aux Politiques Publiques au BRGM, service géologique national français, et ingénieure géologue et docteur en géo-sciences.
Pour y parvenir, les projets comme Orca pourraient être une solution viable, mais devront forcément se multiplier à grande échelle.
“4000 tonnes, ce n’est pas rien, mais nous avons besoin d’un grand paquet de ces usines pour faire le travail”, indiquait, lors de l’inauguration de l’usine, Julio Friedmann, climatologue à l’Université de Columbia .
“Nous allons créer une nouvelle industrie, qui devra faire au moins la taille de l’industrie pétrole et gaz actuelle”.
Reste à trouver un modèle économiquement viable pour multiplier ce type d’installation partout sur le globe.
L’inauguration d’Orca est incontestablement une belle avancée dans la lutte contre le réchauffement climatique. Si ce type d’installations venait à se multiplier, et que des actions concrètes étaient prises rapidement par l’ensemble des dirigeants mondiaux, nous pourrions réussir à limiter la hausse globale des températures d’ici 2050.
Pionnière dans ce type de projet, l’Islande prévoit d’ailleurs de créer un vaste hub portuaire pour acheminer du CO2 directement depuis l’Europe du Nord et le stocker par enfouissement sur terre.
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Image de couverture : photo d’illustration.
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