Polar Pod : un bateau vertical pour une expédition inédite dans l’océan Austral !

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Le Polar Pod a été conçu par Ship-ST à Lorient. Pour développer ce projet hors normes, Ship-ST et Jean-Louis Etienne ont impliqué de nombreuses ingénieries françaises : Principia, Noveltis, Mareal, Ultra-Marine Europe, Eceen, Gbing, Sofresid, Mercator, Bureau Veritas, ainsi que les bassins d’essais des carènes de l’Ifremer Brest et de l’Ecole Centrale de Nantes. Le Polar Pod sera la propriété de l’IFREMER

Coup d’envoi pour Polar Pod ! 

Après plus de 10 ans pour le mettre sur pied, Jean-Louis Etienne, l’initiateur de ce projet, lance le passage en phase opérationnelle avec le lancement de l’appel d’offres pour la construction de son navire… vertical ! 

En charge de réaliser dès fin 2023 deux tours du monde au sein du CCA (Courant Circumpolaire Antarctique), ce bateau insolite et bardé d’instruments scientifiques partira à la recherche de données pluridisciplinaires dans cet Océan encore trop méconnu. 

On vous dit tout sur un projet ambitieux.

 

 

Une expédition dans l’Océan Austral

L’Océan Austral, seul océan à réaliser le tour du globe, est aujourd’hui considéré comme le cœur de l’océan mondial.
Et pour cause, ses eaux de fond sont un véritable moteur pour la plupart des mouvements océaniques.

Pour mener à bien cette expédition, le projet Polar Pod prévoit la construction d’un bateau vertical qui sera en charge d’effectuer, dès fin 2023, deux tours du monde dans les eaux du CCA (Courant Circumpolaire Antarctique), qui réunit les océans Indien, Pacifique et Atlantique. Long de 24 000 km et large de 1 000 km, c’est le plus puissant courant de la planète. 

L’activité biologique au sein de ce courant est très intense et il constitue le refuge de nombreux oiseaux de mer et mammifères marins.
Acteur indéniable du climat et réserve de la biodiversité marine, il recèle encore de nombreux secrets…

Si jusqu’à présent de nombreuses missions ont déjà été réalisées dans les eaux de l’Océan Austral, elles restent pour la plupart attachées à un intérêt spécifique, se concentrant à des endroits précis et souvent durant seulement une saison. 

Ici, le Polar Pod réalisera sa mission sur trois ans pour acquérir une multitude de données au fil des saisons, qui seront ensuite transmises à des chercheurs, des océanographes, des biologistes, des climatologues… 

En tout, 12 pays sont concernés par ce projet via 43 institutions scientifiques et autour de quatre acteurs principaux et français : l’Ifremer (Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer), le CNRS (Centre National de Recherches Scientifiques), le CNES (Centre National des Etudes Spatiales) et l’Institution océan polaire.
L’expédition sera financée par un partenariat public-privé, dont le montant n’a pas été dévoilé.

 

 

Un vaisseau très technique

Le Polar Pod est inspiré du FLIP (Floating Instrument Platform), la plateforme océanographique américaine, utilisée durant la seconde guerre mondiale et toujours en activité après 60 ans.

Le navire se présente de manière verticale, avec une plateforme de 100m de hauteur pour un poids de 1 000 tonnes en charge.
Plus haut que la statue de la Liberté, il est ainsi bâti pour faire face aux plus grandes vagues du monde.
Ses jambes en treillis sont réalisées en acier de 38 à 50mm d’épaisseur.
La structure de la nacelle quant à elle est en aluminium et l’extérieur est réalisé en acier spécial capable d’encaisser les plus violentes tempêtes.

Le navire a été conçu sans coque pour être porté par les courants et pour limiter les interactions à la surface qui ont tendance à rendre les mesures moins précises.
Il sera donc porté par les courants, mais sera bien implanté dans les masses d’eau profondes grâce à son lest de 150 tonnes, lui permettant d’être stable en toutes circonstances.
Il disposera également d’une grande capacité d’accueil de capteurs océanographiques et atmosphériques qui lui permettront de mener à bien ses différentes missions. Le tout avec une construction certifiée par le Bureau Veritas.

Le Polar Pod a été prévu pour n’emmener que très peu de personnes à son bord. Seulement huit membres d’équipage (trois marins, quatre scientifiques et un cuisinier) participeront à l’aventure.
L’équipage sera relevé tous les deux mois grâce à un navire rattaché à la mission (type supply de haute mer) conçu spécialement pour cette opération par le cabinet d’architecture navale français VPLP.

Ces relèves régulières permettront de rapporter sur les continents les différents échantillons prélevés.

À cause des vents contraires et des courants défavorables, le Polar Pod ne pourra pas suivre une trajectoire rectiligne.
Grâce à ses voiles et un propulseur transversal placé à 10m sous la flottaison, il aura la capacité d’infléchir son cap pour s’éloigner des icebergs.

 

 

Une solution “zéro émission”

Le Polar Pod a été conçu pour être un vaisseau écologique, proche du “zéro émission”, permettant ainsi d’en faire un prototype sur lequel les futurs navires pourront s’appuyer.
Le navire est sans moteur et peu perturbant pour le milieu. Grâce à sa grande autonomie énergétique, des missions longues pourront être planifiées notamment sur des périodes encore peu accessibles jusqu’à maintenant comme l’hiver austral.

L’habitat a également été pensé de manière à optimiser l’impact écologique. Une nacelle permettant d’héberger huit personnes est située à 15 mètres au-dessus de la surface. Cet hébergement est à “énergie positive” notamment grâce à la performance de l’isolation thermique.

En ce qui concerne la production d’électricité à bord, elle sera alimenté par quatre éoliennes Kingspan de 3,2 kW, ainsi que par des cellules photovoltaïques qui permettront d’alimenter l’éclairage, les télécommunications, l’informatique, la cuisine, le dessalement d’eau de mer, l’eau chaude et les instruments scientifiques.
Cette électricité sera stockée dans deux packs de batteries lithium-ion de 50 kWh chacun.

 

Une mission océanique pluridisciplinaire 

Le Polar Pod menera des expériences scientifiques dans divers domaines, principalement autour de cinq grands axes :

 

Les échanges entre l’océan et l’atmosphère :

L’Océan Austral est une région clé du système climatique de par l’importance des échanges qui y ont lieu entre l’océan et l’atmosphère.
Le Polar Pod sera chargé d’étudier l’amplitude et la variabilité spatiale et temporelle de ces échanges thermiques, chimiques et moléculaires pour mieux les appréhender par la suite.

 

L’observation et le recensement de la biodiversité :

Cette mission servira à observer la biodiversité dans son ensemble, de l’organisme unicellulaire aux cétacés. Cette diversité des écosystèmes pourra alors être, pour la première fois, documentée à grande échelle et au fil des saisons.

 

L’observation satellitaire et acoustique :

Les études et les mesures réalisées par le Polar Pod intéressent les agences spatiales, car elles pourraient grandement enrichir leurs bases de données en termes de calibration et de validation des observations spatiales dans l’Océan Austral.
Des hydrophones seront également placés à plus de 75 mètres de profondeur pour faire un inventaire sonore sous-marin et aider au développement d’outils de détection acoustique environnementale (tremblement de terre, météo, icebergs…).

 

L’impact humain :

Le quatrième axe de recherche s’intéressera à la contamination de l’Océan par les activités humaines, que cela soit par la pollution chimique, les déchets lactiques ou encore la pollution sonore. Le Polar Pod s’intéressera à ces différentes pollutions de l’air et de l’eau au fil des saisons et tout le long du CCA.

 

Un programme pédagogique :

Aux vues de l’ampleur et de l’importance de cette expédition, elle disposera également d’un axe plus large, avec un programme de médiation et un programme pédagogique à destination des scolaires et du grand public.
Pour ce faire, ce projet, piloté par Séverine Alvain, chargée de médiation scientifique au CNRS, et s’accompagnera de films et d’expositions immersives dans des musées, de concours de mini Polar Pod, ainsi que de minibus aménagés nommé PolarPodBus, qui iront directement à la rencontre du grand public en France pour des expériences inédites en réalité virtuelle.

 

Cette aventure scientifique hors normes promet de grandes découvertes et des avancées majeures dans différents domaines.
Mais au-delà de son aspect technique impressionnant, sa particularité s’inscrit dans une démarche de coopération de la recherche scientifique mondiale et dans le désir de partager ces connaissances avec le monde entier sur un Océan dont on ignore encore beaucoup de choses.

 

En savoir plus sur Polar Pod (photos, infos).

 

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Photo de couverture : photo d’illustration.

Important : cet article, comme la plupart des articles présents sur notre blog, vise uniquement à relayer des informations et/ou des projets en rapport avec nos domaines d’activités ou que nous trouvons intéressants.
Nous précisons que Bee Engineering n’est pas impliqué dans ce projet.