Hypérion : Bordeaux accueille la plus haute tour résidentielle en bois de France

 

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La plus haute tour française résidentielle construite presque entièrement en bois a été livrée cet été par Eiffage.

Baptisée Hypérion, cette tour culminant à 55 mètres de haut située à Bordeaux est désormais la plus haute tour résidentielle de France construite dans ce matériau, dépassant ainsi celle de Strasbourg (38 mètres).

 

 

Un projet presque intégralement en bois

Mené par Eiffage Immobilier et imaginé par l’architecte parisien Jean-Paul Viguier, qui avait remporté l’appel d’offres en 2015, le projet Hypérion vient de prendre place dans le paysage bordelais.
Situé dans le nouveau quartier Euratlantique, près de la gare Saint-Jean, le programme Hypérion se compose de 176 logements répartis dans 4 bâtiments, d’un bâtiment de bureaux ainsi que deux commerces en pied d’immeuble.

Mais le point culminant de ce programme reste sa tour, dont le nom fait référence au plus haut séquoia du monde, qui dispose d’une particularité unique : elle est principalement construite à partir de bois.

Au total, pas moins de 1 400 m3 de bois ont été utilisés pour réaliser ce bâtiment, soit environ 60% de sa surface globale.
Cette tour de 16 niveaux et de 55 mètres de haut s’érige autour d’un noyau et d’un socle en béton de trois niveaux.
À partir du R+3 et jusqu’au 16ème étage, les différents planchers et poteaux en bois ont été installés autour du tronc principal. Ils ont été réalisés en CLT, un bois lamellé croisé de 20 cm d’épaisseur et constitué de 3 à 11 couches de bois collées entre elles.
Les poutres sont quant à elles conçues en structure mixte avec à la fois du bois et du métal. Les murs en ossature bois Hypermob®, développés sous ATEx de catégorie A multi-chantiers, ont permis d’atteindre les 50 mètres de hauteur.
Une structure dont la composition optimale a été longue à trouver lors de la phase expérimentale pour décrocher toutes les certifications nécessaires et valider les normes de sécurité.

À l’intérieur, pour pallier aux mauvaises propriétés acoustiques du bois, le constructeur a réalisé un double plafond et une chape en ciment de 5 cm.
À l’extérieur, pour garder la tour en bon état, notamment face aux intempéries et à la dégradation du bois au fil du temps, la tour à été habillée de panneaux de bardage minéraux Rockpanel fabriqués à partir de basalte, une roche volcanique naturelle.

141 balcons en porte-à-faux, préfabriqués à Bordeaux, construits à base d’acier et de verre ont également été greffés sur la façade, avec une surface pouvant aller jusqu’à 30 m2 pour les plus grands.

Grâce à sa construction bois hors-site, le projet a bénéficié d’une maîtrise et d’une rapidité d’exécution nettement supérieure à celle d’un chantier traditionnel.
Composé de produits finis d’une qualité constante, il a également été constaté une diminution des nuisances habituellement liées aux chantiers. 

Le programme, d’un montant de 50 millions d’euros, a déjà livré 90% des logements et 46% sont d’ores et déjà occupés par leurs propriétaires.

 

 

Une construction plus “propre”

La construction de la tour Hypérion s’inscrit dans les nouveaux modes de constructions bas carbone, répondant à l’urgence climatique.

L’utilisation du bois comme matériau principal dans ce projet améliore nettement l’empreinte carbone du bâtiment.
Grâce à l’utilisation du bois comme matériau principal, celui-ci ayant la capacité de stocker le CO2, la tour émet 45% d’émissions carbone en moins par rapport à une structure équivalente traditionnelle.
Sur la globalité de son cycle de vie, l’immeuble devrait permettre l’économie de près de 15 tonnes de CO2 par logement.

Plutôt que d’importer le bois via les filières norvégiennes ou d’Europe centrale, plus compétitive, Eiffage a décidé de favoriser les circuits courts en se fournissant uniquement en Nouvelle-Aquitaine pour ce projet, en collaborant avec la société Piveteau.
C’est donc du pin Douglas, provenant des forêts de Corrèze qui a été utilisé pour la construction de cet édifice. 

Le bâtiment est directement raccordé à un réseau urbain de chaleur alimenté par l’usine d’incinération de déchets de Bègles.
Grâce à celui-ci, les dépenses énergétiques des habitants devraient être plus faibles que dans un immeuble traditionnel. Chaque appartement dispose également d’une application nommée “Domoconso”, permettant aux habitants de suivre et de maîtriser leur consommation d’eau et d’énergies.

La conception bioclimatique de la tour Hypérion met en avant l’utilisation de matériaux biosourcés et isolants naturels, qui devraient être de plus en plus utilisés dans les années à venir pour ce type de construction de logements collectifs. 

 

 

Une construction qui a dû relever des défis

Au moment de l’appel d’offres lancé en 2015 par l’EPA (l’établissement public d’aménagement) Bordeaux Euratlantique, le cahier des charges prévoyait la construction de la plus grande tour d’habitation construite en bois, et dont la hauteur maximale autorisée n’excédait pas les 55 mètres réglementaires.
Le but de cette démarche était d’apporter un véritable soutien au développement de la filière bois, tout en mettant en avant l’innovation du secteur de la construction et en valorisant un territoire bas carbone.
Si le projet était très ambitieux sur le papier, le cabinet parisien de Jean-Paul Viguier, qui a remporté le concours, s’est vite heurté à plusieurs contraintes auxquelles il a fallu remédier.

Tout d’abord : la localisation choisie pour cette tour.
À Bordeaux, l’eau est très présente avec la Garonne sur laquelle la ville est construite.
En creusant pour les fondations, il était donc inévitable de tomber sur de l’eau. La construction uniquement en bois n’était donc déjà plus envisageable à ce stade.

Le second problème rencontré fut d’ordre réglementaire. La région dispose de normes anti-sismiques très spécifiques auxquelles la simple utilisation du bois ne convenait pas.
Pour pallier à ce problème, un socle de trois étages, abritant un parking, a donc dû être réalisé en béton armé.
Il sert principalement de contrevent permettant d’assurer sur le long terme la stabilité du bâtiment.
Une colonne centrale en béton montant jusqu’au seizième étage et abritant les escaliers et les ascenseurs a également dû être intégrée pour consolider l’édifice.

 

 

Malgré un coût de construction supérieur à une construction béton traditionnelle, notamment dû au côté expérimental du projet, celui-ci s’inscrit dans l’ère du temps et fait preuve d’innovation dans le domaine de la construction.

Ce projet, qui espère en inspirer d’autres, ravive aussi l’intérêt pour la filière bois. Eiffage a d’ailleurs déposé un brevet avec la ferme intention de dupliquer cette tour dans le futur.
Le projet de Kaufman and Broad, arrivés seconds à l’appel d’offres avec sa tour Sylva, dessinée par Bellecour Architectes et Art & Build, sera également construit à proximité d’Hyperion et comprendra quant à lui 20 000 m2 de logements.

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Image de couverture :  photo d’illustration.